Un "OVNI" cinématographique !
BIRDMAN
Un film de Alejandro González Iñarritu
Année : 2015
Sorti le : 25 février 2015
Durée : 1h59 min / 119 min
Genre(s) : Drame, Comédie
Nationalité : Américain
Distributeur : Twentieth Century Fox France
Récompense(s) : 14 prix et 43 nominations
Budget : 18 M$
Recette : 107.6 M$
Rentabilité : 598%
Retrouvez les stars : Michael Keaton, Zach Galifianakis, Edward Norton, Andrea Riseborough, Amy Ryan, Emma Stone, Naomi Watts, Lindsay Duncan, Jeremy Shamos...
Le synopsis
À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego…
S’il s’en sort, le rideau a une chance de s’ouvrir...
La bande annonce officielle
La chronique de Mathilde
Birdman, un film de Alejandro González Iñarritu (2015)
Birdman a fait couler beaucoup d’encre avant même sa sortie. Il faut dire qu’Iñarritu peut se targuer d’être un réalisateur prodige (voir la trilogie Amours Chiennes (2000), 21 Grammes (2003) et Babel (2006)) qui joue sur l’entremêlement des fils rouges avec brio. L’esthétique de ses films où planent des silences caractéristiques et lourds de significations, sa manie de brouiller les pistes et de mener le spectateur sur de fausses pistes sont reconnaissables entre tous.
Mais pourquoi ne pas avoir gardé la même recette pour ce Birdman qui s’annonçait pourtant prometteur ? Une déception proportionnelle à l’engouement qu’ont suscité chez moi ses films précédents.
Le générique d’ouverture rappelle celui qui faisait la marque de fabrique de Pierrot le Fou (Jean-Luc Godard, 1965), la symbolique en moins.
Le fameux Riggan Thompson, incarné par un Michael Keaton terne, déambule dans les couloirs d’un théâtre. Il aboie des ordres rendus presque inintelligible par l’insupportable batterie (mais pas batteur, puisqu’il ne s’agit de rien de moins que d’Antonio Sanchez, à bon entendeur !) qui s’acharne sur le trottoir de Broadway. Déjà, on se demande « pourquoi ? ». Le musicien nous tape sur le système avec une insolente effronterie motivant un agacement grandissant à mesure que le film se poursuit.
On s’attend à vivre ces deux heures de film dans un huis-clos, certains réconfortés à l’idée d’être bercé dans le confort et la chaleur évanescente de la Vénus à la Fourrure (Roman Polanski, 2013). Mais non.
Une scène bien particulière s’ancre dans les annales de « ces films énervants qu’on regarde jusqu’au bout par curiosité ». Cette scène, c’est celle où Riggan s’énerve contre l’un de ses comédiens qui « n’a jamais aussi bien joué qu’en saignant de l’oreille » après qu’il ait été puni de sa médiocrité par les pouvoirs divins –et franchement de mauvais goût, malgré leur symbolique- du héros.
Or, on a envie de saisir ce Riggan par les épaules et le secouer énergiquement en lui criant qu’il est encore plus raté que son acteur de théâtre. Sans parler de sa propre fille, dont le rôle est endossé par une Emma Stone on ne peut plus niaise, à l’instar de toutes les autres actrices (la comédienne presque violée, l’autre presque déchue…), qui n’évoquent que de pauvres seconds couteaux larmoyants et comparables à des ados en pleine crise.
En somme : elles sont aussi crédibles que la critique de Broadway, si peu crédible justement dans son rôle de grande journaliste qui base ses papiers sur… Tout sauf l’art ! Mais plutôt sur la frustration qu’entretient sa situation de pauvre femme aigrie et jalouse. On n’aurait pas pu trouver critique moins convaincante. La réplique affligeante : « je vais appeler la police » alors que Riggan s’empare simplement de son bloc-notes résume à elle-seule la totale inutilité d’un personnage si peu travaillé.
Quant à Edward Norton pourtant irréprochable, il ne se départit pas de son image de Fight Club (David Fincher,1999) qui approche désormais davantage de la popularité que de sa « cousine racoleuse » qu’est le prestige. À force d’user et d’abuser d’un stéréotype de personnage (et de la réputation qu’il se forge) pour un acteur en particulier, il finit par lui coller à la peau et à ne plus pouvoir s’en détacher aux yeux du spectateur. Vraiment dommage.
Les personnages forment donc cette pierre d’achoppement sur laquelle bute sans arrêt Iñarritu, lui qui aurait fait pleurer les pierres avec son 21 Grammes. L’indifférence règne donc concernant les personnages. Il pourrait leur arriver tous les malheurs du monde qu’on ne laisserait guère perler une larmichette sur leur triste sort.
À part le pire des mépris qu’est l’indifférence, le film ne suscite rien. Une vague surprise, peut-être, lorsque les effets spéciaux entrent en jeu pendant une période presque jouissive de vingt secondes. Et encore : le saut dans le vide de Riggan lorsqu’il survole la ville est aussi répulsif que la défenestration de Marina Foïs dans Polisse (Baïwenn LeBesco, 2011), voire pire que les mauvaises incrustations sur fond vert à la Mary Poppins (Robert Stevenson, 1964), sans l’excuse des « moyens de l’époque ».
On pourrait s’attarder sur la mise en scène, histoire de redresser un peu la barre. Les plans-séquence offrent une sensation de fluidité. Les transitions entre les scènes de la pièce sont parfois joliment agrémentées de fondus dans le décor lui-même. Mais même ça rappelle les scènes kitchs du Lovely Bones de Peter Jackson (2009).
Pour surenchérir dans l’intertextualité, on peut comparer la fin « glorieuse » de Riggan à celle de Nina dans Black Swan (Darren Aronofsky, 2011), et remarquer l’humour assimilable aux frères Cohen mais jouant un peu trop sur la prosodie avec la bande sonore, noter le potentiel clin d’œil au lapin de taille humaine de Donnie Darko (Richard Kelly, 2001), j’en passe et des meilleurs. Mais bon… Et alors ?
Cela évoque vaguement l’infect Lucy de Luc Besson, et est à peu près à la même hauteur niveau déception suscitée, après le brouhaha de la presse et les retours laudatifs des États-Unis.
Pas de moral, pas de leçon, pas d’esthétique, pas d’acteur remarquable, des mouvements de caméras incessants qui donnent l’impression permanente d’être sur un ferryboat, pas de bande-son notoire (il faut vraiment connaître Antonio Sanchez pour s’y attarder), pas de scénario original, pas de réel genre à attribuer à ce film.
Pour moi, ainsi s’écrasent en beauté tous les espoirs placés dans un film réalisé par un cinéaste que j’idolâtrais presque depuis Babel. Une légende qui s’effondre, jusqu’à son prochain film qui ne nécessitera pas de lire entre les lignes du scénario pour y trouver une idée fugitive frôlant la perfection, comme il sut le faire jadis.
Mathilde
le 19.02.2015
Une appréciation personnelle de 10/20
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Ce film figure dans un TOP !
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